Pourquoi mon proche oublie-t-il des événements récents mais se souvient du passé ?

Livre Raconte-moi ton histoire ouvert à l’arbre généalogique

Comprendre la mémoire : comment fonctionne-t-elle ?

Il peut être troublant de voir un proche oublier ce qu’il a déjeuné la veille mais se souvenir dans les moindres détails de sa jeunesse. Avant de tirer des conclusions hâtives, il est utile de comprendre comment fonctionne la mémoire humaine. Notre cerveau dispose de plusieurs systèmes de mémoire. La mémoire à court terme ou mémoire de travail, permet de retenir des informations sur une courte durée. En revanche, la mémoire à long terme conserve les souvenirs sur une période beaucoup plus longue.

Avec l’âge, il est courant d’observer un affaiblissement de la mémoire à court terme, tandis que les souvenirs anciens, stockés en mémoire à long terme, restent relativement intacts. C’est souvent l’une des premières observations qui inquiètent les proches : “pourquoi raconte-t-il encore cette anecdote d’enfance alors qu’il ne se rappelle plus de ma visite d’hier ?”.

Le rôle des émotions dans la construction des souvenirs

Un facteur essentiel pour comprendre cette situation réside dans le lien entre mémoire et émotion. Les souvenirs chargés émotionnellement sont mieux encodés dans la mémoire à long terme. Ainsi, des événements profondément marquants comme un mariage, une naissance ou un déménagement dans l’enfance, restent ancrés dans le cerveau. Le circuit neuronale activé lors de ces événements est plus solide, et plus durable. Cela explique pourquoi un parent âgé peut se souvenir de son premier vélo, alors qu’il oublie régulièrement l’heure de son rendez-vous médical.

Ce mécanisme peut être mis à profit dans des situations de perte de mémoire naissante, que ce soit pour stimuler la mémoire par la réminiscence ou simplement pour renforcer les liens affectifs à travers le partage. Cet article explore en profondeur comment les souvenirs personnels peuvent être utilisés pour soutenir la mémoire face aux premiers signes de pathologies neurodégénératives comme Alzheimer.

Vieillissement, mémoire et maladie : comment distinguer le normal du pathologique ?

Le vieillissement naturel du cerveau entraîne une baisse progressive des capacités cognitives chez tout individu. Cependant, lorsque les oublis deviennent fréquents, concernent des faits récents importants, et interfèrent avec la vie quotidienne, il devient pertinent de se poser des questions. Un oubli occasionnel d'un prénom ne doit pas nécessairement inquiéter, mais une désorientation dans un lieu familier ou la répétition des mêmes phrases plusieurs fois par jour peut être un signe précurseur.

Dans ce cas, il est conseillé de consulter un médecin pour poser un diagnostic. Si vous observez que votre proche “vit dans son passé”, il peut être utile de lire cet article qui explore le lien entre confusion passé/présent et troubles cognitifs.

Pourquoi les souvenirs anciens restent plus accessibles ?

Les chercheurs en neurosciences décrivent un phénomène appelé “gradient de Ribot”, qui indique que les souvenirs les plus anciens sont plus résistants aux troubles de la mémoire que les souvenirs récents. Selon cette observation, les événements anciens, encodés depuis longtemps dans la structure cérébrale, sont plus solidement ancrés que les nouveaux apprentissages ou souvenirs, qui peuvent être fragiles ou moins consolidés dans un cerveau vieillissant.

Chez les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, ce phénomène est amplifié : la mémoire épisodique (celle des événements récents) est la première touchée. Dans ce contexte, comprendre la cause des oublis permet de ne pas banaliser une situation qui mérite parfois attention médicale. Pour en savoir plus, vous pouvez consulter notre article sur les symptômes précoces de l’Alzheimer.

Comment accompagner un proche qui oublie les événements récents ?

Face à ces oublis, la patience, l’écoute et des stratégies adaptées peuvent faire la différence. Essayer de corriger ou de confronter un proche à ses erreurs peut générer de la frustration inutile. Mieux vaut favoriser un environnement stable, structuré, et riche en éléments familiers. De nombreux spécialistes recommandent de recourir à des activités de stimulation cognitive douce — comme l'évocation de souvenirs anciens à travers des photos, des chansons, ou même des écrits.

Une des manières de stimuler la mémoire tout en créant des moments de partage doux et authentiques peut être d’inviter le proche à raconter son histoire. Des supports existent pour guider et structurer cet exercice. Le livre “Raconte-moi ton histoire” propose par exemple des questions ouvertes réparties sur différents thèmes de vie qui tendent à réveiller la mémoire émotionnelle, souvent préservée plus longtemps.

Livre Raconte-moi ton histoire dans sa boîte cadeau sous un sapin

Créer du lien malgré la perte de mémoire

Plutôt que de se concentrer sur ce que la personne ne peut plus faire, il est souvent plus bénéfique de partir de ce qu’elle est encore capable de partager. L’évocation de souvenirs anciens peut être un terrain fertile pour les échanges intergénérationnels. Par ailleurs, cela peut réduire les sentiments de solitude ou de perte d’identité ressentis par certaines personnes âgées lorsqu’elles prennent conscience de leurs pertes de mémoire.

Mettre en valeur leurs souvenirs d’enfance, les traditions familiales ou leur vision du monde d’autrefois peut transformer la dynamique familiale. Cela permet aussi de créer une trace précieuse pour les générations futures : un héritage affectif et narratif. Cela se rapproche de ce que propose Raconte-moi ton histoire, une manière douce d’éveiller la mémoire et de la transmettre.

Quand faut-il s’inquiéter réellement ?

Les oublis bénins ne nécessitent pas immédiatement une consultation. Toutefois, si ces oublis s’intensifient, apparaissent en parallèle de changements de comportement, de difficultés à accomplir des tâches simples ou de pertes de repères dans l’espace et le temps, il convient d’agir. Pour explorer ce sujet, nous conseillons la lecture de notre article sur les difficultés à planifier, un des signaux précurseurs d’un déclin cognitif.

De même, si vous constatez une forte répétition quotidienne (“il me dit dix fois la même chose par jour”), notre dossier sur la répétition excessive des propos peut vous aider à y voir plus clair.

Conclusion

Voir un proche perdre la mémoire récente mais se souvenir parfaitement de son enfance n’est pas rare. Cela reflète les mécanismes complexes de la mémoire humaine, mais peut aussi annoncer des troubles plus profonds. Quoi qu’il en soit, ces souvenirs conservés sont à la fois une ressource émotionnelle et un patrimoine intime. Les raviver ensemble peut aider à mieux vivre le présent, malgré ses oublis.

Encourager nos proches à raconter leur parcours de vie, à leur rythme, est souvent l’un des plus beaux cadeaux que l’on puisse leur offrir. Et parfois, un support simple comme un livre-guidé peut ouvrir de grandes portes.