Dans les moments où un proche traverse une période difficile, il est parfois compliqué de trouver les bons mots ou les bons gestes. Même avec les meilleures intentions, on peut se sentir impuissant face à sa douleur ou son mal-être. Pourtant, il existe une ressource souvent négligée, incroyablement puissante et profondément humaine : la mémoire des beaux moments. En aidant une personne à se souvenir des instants heureux de sa vie, on ne cherche pas à nier ses difficultés, mais à lui tendre un fil, solide et doux, vers ce qui l’a construit, ce qui l’a rendu vivant.

Pourquoi les souvenirs heureux peuvent aider à traverser une période difficile

La mémoire autobiographique joue un rôle central dans la construction de notre identité. Lorsque nous revivons volontairement des souvenirs positifs, notre cerveau libère des substances qui améliorent notre état émotionnel, comme la dopamine ou l’ocytocine. Mais plus encore, ces souvenirs agissent comme des balises : ils nous rappellent ce que nous avons vécu, surmonté et aimé.

Pour une personne en souffrance émotionnelle, se reconnecter à ses expériences passées positives peut agir comme un appui stable à partir duquel se reconstruire. Cela peut renforcer l’estime de soi, réveiller le sentiment de gratitude, et réactiver des liens affaiblis par les difficultés présentes. Cette démarche peut être particulièrement bénéfique si elle est accompagnée par un proche, dans un cadre où l'écoute et l’attention sont sincères.

Créer un espace pour faire émerger les souvenirs positifs

Il ne suffit pas de dire à quelqu’un de penser à des choses joyeuses pour que cela fonctionne. Il faut souvent du temps, de la sensibilité et un environnement propice. Voici quelques conseils concrets :

• Proposer un moment calme : Choisissez un moment où la personne se sent disponible, sans pression ni distraction. L’idéal est un après-midi paisible ou une soirée tranquille.
• Utiliser des supports concrets : Feuilleter un album photo, écouter une musique marquante, ou relire de vieilles lettres peut réveiller spontanément des émotions positives.
• Poser des questions ouvertes : Favorisez les formulations qui invitent à la narration : « Quelle est l'une des plus belles vacances que tu aies vécue ? », « Quels sont les petits plaisirs qui t’ont fait le plus de bien dans ta vie ? »

À ce titre, nous avons partagé quelques conseils dans l'article L’importance de poser les bonnes questions pour aider un proche en souffrance. Ces techniques d’écoute active peuvent faire toute la différence dans votre démarche.

Transformer les souvenirs en récits : un levier thérapeutique

Lorsque les souvenirs sont mis en mots, ils s’organisent, prennent forme et deviennent plus tangibles. Ce processus de narration permet parfois à la personne de se voir sous une lumière nouvelle : elle redécouvre ses ressources, sa créativité, sa résilience.

C’est pour cette raison que les professionnels de la santé mentale, comme l’indique l'article Intégrer le récit de vie dans un parcours de soin en santé mentale, intègrent de plus en plus le récit biographique au sein de leurs accompagnements.

En tant que proche, vous pouvez aussi initier cette démarche en douceur. Par exemple, en co-écrivant avec la personne un fragment de son parcours ou en lui proposant de remplir un support dédié. Le livre Raconte-moi ton histoire est un outil discret mais puissant dans cette optique : il contient des questions guidées, pensées pour faire émerger les souvenirs personnels de manière progressive et bienveillante.

Rendre hommage à la valeur d’une vie, même dans les instants difficiles

Quand une personne traverse un passage à vide, elle peut perdre de vue l’importance qu’elle a eue pour les autres et la richesse de ce qu’elle a vécu. Aider quelqu’un à se reconnecter avec son vécu, ses souvenirs, ses fiertés, c’est aussi lui rappeler combien il ou elle compte.

Cela peut passer par des petits rituels réguliers :

• Évoquer chaque semaine un souvenir heureux autour d’un café ou d’un repas.
• Créer une boîte à souvenirs avec des objets, des photos ou des petits mots rappelant des moments de joie.
• Tenir un journal partagé où chacun écrit une anecdote personnelle touchante ou drôle.

Ces gestes, simples en apparence, peuvent réactiver le sentiment d’appartenance et la fierté d’avoir laissé une empreinte. Ils permettent aussi, peu à peu, de remettre en circulation une énergie positive dans le quotidien.

Quand l’écriture devient une introspection réparatrice

L’écriture de soi peut être une véritable thérapie silencieuse. Dans certains cas, lorsqu'on ne parvient pas à parler de son mal-être, écrire devient un exutoire accessible et structurant.

Notre article Apprivoiser ses émotions grâce à l’introspection par l’écriture explore en détail la manière dont cette forme d’expression impacte positivement l’état émotionnel.

Vous pouvez encourager doucement votre proche à tenir un carnet, à écrire librement des souvenirs agréables, ou à répondre à des questions sur sa vie passée. Cette démarche, lorsqu’elle est progressive, sans jugement, peut devenir un vrai tremplin intérieur.

Offrir une écoute sans direction : laisser la personne choisir

Il est essentiel de respecter le rythme de la personne. Certaines auront besoin d’un long silence avant de vouloir replonger dans leurs souvenirs. D’autres préféreront un accompagnement plus encadré. Accepter cela, c’est déjà lui faire du bien : car on l’accepte dans ce qu’elle vit ici et maintenant.

Pour approfondir, vous pouvez aussi lire Que dire à une personne qui n’arrive pas à parler de son mal-être. Ce type de situation est délicate, et faire preuve d’une écoute patiente peut être l’un des plus beaux cadeaux à offrir.

Un cadeau à double portée : aider l’autre tout en créant des liens

Quand on propose à quelqu’un de revenir sur ses souvenirs heureux, on ne l’aide pas seulement à aller mieux. On nourrit aussi le lien relationnel. C’est un geste d’amour, de reconnaissance mutuelle, et souvent, pour celui qui écoute, une manière de tisser à son tour un héritage émotionnel.

Inviter un proche à raconter son histoire est une démarche profondément humaine. Comme nous le mentionnons dans notre article Inviter un être cher à raconter son histoire pour l’aider à se sentir écouté, c’est lui dire : « Tu as de la valeur. Ce que tu as vécu a du sens. Et je suis là pour l’écouter. »

Et parfois, c’est dans cette reconnaissance simple que naît le plus grand soulagement.