Que dire à une personne qui n'arrive pas à parler de son mal-être

Certains silences pèsent plus lourd que les mots. Lorsqu’un proche semble souffrir mais ne parvient pas à en parler, il peut être difficile de savoir comment agir. Comment aider sans forcer ? Comment montrer qu’on est là, sans intrusion ? Que peut-on dire à une personne qui retient sa douleur au fond d’elle ? Cet article apporte des réponses humaines et concrètes à ces questions délicates.

Comprendre les raisons du silence face au mal-être

Avant de chercher à faire parler une personne de son mal-être, il est essentiel de comprendre pourquoi elle se tait. Le silence peut être un mécanisme de protection, une façon de ne pas revivre des émotions douloureuses, de ne pas inquiéter les autres ou de préserver une image de soi forte. D'autres, tout simplement, ne trouvent pas les mots ou ne savent pas par où commencer.

Chaque histoire est unique. L'important est de ne pas interpréter ce silence comme un rejet ou une indifférence. Il est souvent le reflet d'un conflit intérieur intense. Dans ce contexte, savoir poser les bonnes questions avec patience et bienveillance peut faire toute la différence.

Créer un espace de confiance et de non-jugement

Avant d'espérer que l'autre parle, il faut qu’il sente qu’il en a le droit, qu'il ne sera ni jugé ni pressé. On peut le rassurer en exprimant directement son intention :

  • « Tu n’es pas obligé de parler, mais sache que je suis là si un jour tu veux. »
  • « Je ne prétends pas savoir ce que tu vis, mais je veux être à tes côtés. »

Il est aussi utile de créer un moment simple et doux, loin des distractions. Une sortie au calme, une marche, ou même un silence partagé peuvent ouvrir une brèche. On peut aussi s’inspirer de manières plus créatives d’organiser un moment d’écoute autour de la mémoire, qui, sans confronter l’autre, lui laisse le choix de s’exprimer ou non.

Inviter à parler par des souvenirs partagés

Parler de mal-être, c’est souvent revisiter des blessures profondes. Or, il peut être plus facile d’aborder le passé pour comprendre le présent que d’attaquer frontalement la souffrance actuelle. Les souvenirs sont parfois des points d’entrée plus doux.

Certains outils permettent justement d’ouvrir la parole en douceur. Le livre Raconte-moi ton histoire par exemple, offre un cadre rassurant à la personne : il contient des questions guidées sur l’enfance, les liens familiaux, les événements marquants de la vie. Il ne demande pas de se livrer directement sur sa peine, mais amène subtilement la personne à reconstituer son histoire, à relier les éléments de son vécu — parfois même sans s’en rendre compte.

Livre Raconte-moi ton histoire ouvert à la page d’un arbre généalogique

Ces souvenirs, qu’ils soient heureux ou difficiles, ont le pouvoir de libérer la parole — doucement, sans pression. Plus encore, ce type d’objet peut permettre de créer un rituel familial autour du partage et de la transmission, renforçant ainsi le sentiment d'appartenance et de soutien.

Les phrases à éviter (et celles qui peuvent aider)

Souvent, pensant bien faire, on prononce des paroles qui, au lieu de réconforter, ferment encore davantage le dialogue. Voici quelques maladresses fréquentes :

  • « Ce n’est pas si grave, tu vas t'en remettre. »
  • « Il y a pire dans la vie. »
  • « À ton âge, moi aussi j’ai galéré. »

Ces phrases minimisent la souffrance de l’autre. Vos intentions sont bonnes, mais l'effet peut être l'isolement accru. Préférez des formulations ouvertes et bienveillantes, par exemple :

  • « Je ne sais pas exactement ce que tu ressens, mais je suis là pour t’écouter. »
  • « Tu n’as pas besoin d’aller bien pour qu’on passe du temps ensemble. »
  • « Quand tu seras prêt, je serai là. Il n’y a aucune urgence. »

Ces phrases donnent le contrôle à la personne. Elles lui rappellent qu’elle a un espace où elle peut exister entièrement, même dans sa détresse.

Favoriser des formes d’expression alternatives

Certaines personnes ne parviennent tout simplement pas à verbaliser leur mal-être. Pour autant, cela ne signifie pas qu’elles ne souhaitent pas l’exprimer. L'écriture, le dessin, la musique, ou même la photographie peuvent devenir des médiums thérapeutiques. Offrir un carnet pour écrire ou tenir un journal de bord, encourager à tenir un blog personnel ou un projet créatif, peut ouvrir un chemin vers soi.

Des psychologues comme Boris Cyrulnik rappellent souvent que la narration de soi – écrire ou raconter son histoire – est un tremplin fondamental vers la résilience. Inviter un proche à documenter ses souvenirs, ses rêves ou même ses blessures dans un format où il n’est pas contraint de les verbaliser en face à face peut être libérateur. Certaines pistes se trouvent dans cette sélection d’astuces pour évoquer doucement les moments douloureux du passé.

Livre Raconte-moi ton histoire sur un lit avec un stylo

La patience, un cadeau silencieux

Parfois, ce dont une personne en souffrance a le plus besoin, c’est d’une présence régulière, discrète, mais stable. On croit souvent, à tort, qu’il faut faire, dire ou chercher des solutions. En réalité, être là, écouter sans but, envoyer un message de temps en temps, proposer une activité simple... tout cela forge un socle solide sur lequel la confiance peut émerger.

Le chemin vers la parole peut être long. On ne contrôle ni le rythme ni les mots de l'autre. Mais on peut décider d'être un repère fiable, une oreille offerte, sans détour ni demande. Et cette posture, à elle seule, est souvent un premier pas vers le mieux-être partagé.

Faire appel à un professionnel sans brusquer

Si aucun échange ne semble possible et que la souffrance devient visible (isolement extrême, comportements à risque, perte d’intérêt durable), il peut être utile de suggérer un accompagnement professionnel. Il ne s’agit pas de forcer ni de diagnostiquer à la place de l’autre, mais de l’inviter à envisager un soutien :

  • « Tu sais, moi-même j’ai déjà eu besoin d’aide extérieure. Ce n’est pas un échec, c’est un courage. »
  • « Je connais des associations ou des psychologues discrets, si jamais tu veux explorer cette voie. »

Des structures comme Psycom ou les centres médicopsychologiques publics peuvent proposer une première consultation confidentielle et gratuite. En parallèle, il peut être pertinent d’encourager des activités qui favorisent la connexion à soi, comme la marche, l’art, ou des groupes de parole.

Nous avons abordé plus en profondeur l’impact des souvenirs refoulés sur le bien-être dans cet article dédié, essentiel pour mieux comprendre les blocages invisibles mais persistants.

Aider une personne qui n’arrive pas à parler de son mal-être ne passe pas nécessairement par des grandes discussions. Parfois, un geste, un livre, un souvenir partagé suffisent à déclencher une lueur. Laissons ouvert le chemin du dialogue, et surtout, gardons en tête que le respect du silence est déjà une forme d’amour.