Les souvenirs refoulés ont-ils un impact sur notre bien-être mental actuel ?

Notre mémoire n’est pas seulement une galerie de moments heureux. Elle abrite aussi des souvenirs plus complexes, parfois trop douloureux pour qu’on les affronte consciemment. Ces souvenirs sont souvent mis de côté, volontairement ou non, et deviennent ce que l’on appelle des “souvenirs refoulés”. Mais que deviennent ces fragments de vie ignorés ? Peuvent-ils réellement impacter notre bien-être mental aujourd’hui ? Cet article explore cette question en profondeur, à travers les regards croisés de la psychologie, de la mémoire, et de notre rapport à l'histoire personnelle.

Qu'est-ce qu'un souvenir refoulé ?

Selon la théorie freudienne, qui demeure encore influente aujourd’hui, le refoulement est un mécanisme de défense inconscient qui vise à éloigner de notre conscience les expériences jugées trop perturbantes. Cela peut concerner des événements graves – comme un traumatisme – mais aussi des moments plus subtils : sentiments d’abandon durant l’enfance, humiliation scolaire ou conflits familiaux non résolus.

Ces souvenirs ne disparaissent pas. En filigrane, ils laissent une empreinte sur notre fonctionnement émotionnel. Loin d’être éradiqués, ils peuvent ressurgir sous forme d’angoisse, de schémas relationnels répétitifs ou encore de symptômes physiques inexpliqués.

Comment les souvenirs inconscients influencent-ils notre comportement ?

Il est fréquent de remarquer que certaines situations réactivent des émotions disproportionnées, sans que l’on comprenne pourquoi. Ce phénomène peut être le symptôme d’un souvenir refoulé qui fait surface de manière détournée. Ces émotions non digérées influencent alors nos réactions, nos décisions et même notre estime de soi.

Par exemple, une personne ayant grandi dans un environnement émotionnellement instable pourrait, une fois adulte, éviter toute forme de conflit ou se méfier excessivement des liens affectifs, sans en comprendre la source. Se pencher sur l'origine de ces comportements peut permettre une libération. Le fait de revisiter sa propre histoire personnelle est alors un levier thérapeutique puissant.

Quels signaux peuvent indiquer la présence de souvenirs refoulés ?

Certains signes peuvent suggérer que des souvenirs importants ont été occultés :

  • Des réactions émotionnelles intenses à des situations anodines
  • Des épisodes de dissociation ou des “trous” dans la mémoire
  • Une difficulté à parler de certaines périodes de sa vie
  • Des rêves récurrents ou des cauchemars mystérieux
  • Une impression diffuse d’être déconnecté de soi-même

Il ne s’agit pas toujours de souvenirs traumatiques évidents. Il peut s’agir d'abandons, de non-dits, de culpabilité non résolue. L’absence de narration autour de ces épisodes laisse un vide que le mental comble parfois par des symptômes ou des blocages émotionnels.

Pourquoi revisiter son passé peut libérer le présent

Donner un sens à ce que l’on a vécu, même dans ses zones les plus troubles, permet de sortir d’un mode de fonctionnement automatisé. Comprendre le chemin parcouru, relier les événements entre eux, accorder de la valeur aux épreuves traversées : autant d’étapes qui représentent un processus cathartique.

Dans cet esprit, certains outils permettent d’amorcer un travail personnel, sans obligatoirement passer par une thérapie formelle. Écrire son histoire de vie est l’un d’entre eux. C’est d'ailleurs ce que propose le livre Raconte-moi ton histoire, à travers une série de questions bienveillantes permettant à chacun de mettre des mots sur son vécu, à son rythme.

Livre ouvert à la page de l'arbre généalogique

Comment encourager l’expression des souvenirs douloureux ?

Tout le monde n’est pas prêt à parler immédiatement de ce qu’il a vécu, surtout si ces souvenirs sont liés à un fort inconfort émotionnel. C’est là que la posture de l’accompagnant prend tout son sens. Parents, amis, conjoints : nous avons tous un rôle à jouer pour faciliter la parole de ceux que nous aimons.

Adopter une écoute attentive, poser des questions ouvertes et créer un cadre sécurisant sont des premiers pas concrets. L’article Encourager un proche à se confier à travers des questions bienveillantes revient en détail sur cette démarche sensible et profondément humaine.

Souvenirs refoulés et transmission familiale : un impact transgénérationnel

Les souvenirs que l’on choisit de taire ne disparaissent pas dans le silence. Ils peuvent resurgir chez les générations futures sous forme de peurs inexpliquées, de comportements répétitifs ou de mythes familiaux. Le psychiatre Boris Cyrulnik parle à ce sujet de “fantômes familiaux”.

C’est pourquoi renouer avec son passé ne relève pas seulement d’un besoin personnel, mais peut aussi être un acte fort de transmission et de libération générationnelle. Laisser une trace écrite de ce que nous avons traversé donne aux générations suivantes un socle pour comprendre leur propre construction identitaire.

Dans cette optique, écrire un récit de vie, ou mener un proche à se raconter à travers un support structuré comme Raconte-moi ton histoire, peut être une démarche profondément réparatrice à l’échelle familiale.

Livre Raconte-moi ton histoire dans une boite cadeau au pied du sapin

Des pistes pour amorcer un travail personnel autour de ses souvenirs

Voici quelques pistes non thérapeutiques qui peuvent permettre de se reconnecter à des souvenirs enfouis avec bienveillance :

  • Utiliser un journal intime ou un livre structuré pour raconter sa vie
  • Regarder d’anciennes photographies en réfléchissant aux émotions qu’elles évoquent
  • Prendre le temps de construire son arbre généalogique
  • Lire des ouvrages de développement personnel autour de la mémoire et de la résilience
  • Pratiquer l’écriture libre autour d’un mot-clé marquant (“école”, “famille”, “amour”, etc.)

Ces pistes peuvent être explorées en solo ou avec un proche, comme un parent âgé. C’est également l’un des ressorts de l’article Utiliser les souvenirs comme outils de libération émotionnelle, qui donne des stratégies concrètes pour faire la paix avec son passé.

Donner du sens à sa vie en retraçant son histoire

Raconter son parcours, poser des mots sur ce qu’on a vécu, c’est donner un fil conducteur à son existence. Cette démarche permet de prendre du recul, d’accepter les parts d’ombre et de reconnaître la richesse de son chemin, même chaotique. Cela peut aussi être l’occasion de (re)trouver un équilibre psychologique, comme le détaille cet article sur l’importance du bilan personnel.

Par extension, cela peut également amener à mieux comprendre les difficultés actuelles de nos proches. L’écoute de leur histoire peut ouvrir une nouvelle forme d’empathie, précieuse dans les relations humaines. L'article Comment mieux comprendre la dépression d’un proche en écoutant son histoire montre concrètement comment certaines réponses peuvent se trouver dans le récit de leur vie.

Les souvenirs refoulés ont, certes, leur raison d’être dans notre psyché. Mais dès lors qu’ils entravent notre liberté intérieure, essayer de les comprendre, les documenter ou simplement les reconnaître devient un acte authentique de soin de soi.