Lorsque la maladie s’installe dans la vie d’un proche, en particulier lorsqu’il s’agit de troubles de la mémoire comme la maladie d’Alzheimer ou d’autres maladies dégénératives, une question délicate émerge rapidement : comment préserver son histoire personnelle et familiale avant que les souvenirs ne s’effacent ? Il est possible d’agir, avec douceur, attention et méthode, pour conserver ces bribes de vie qui racontent une époque, des émotions, des liens. Voici comment faire.
Pourquoi est-il essentiel de sauvegarder les souvenirs familiaux ?
Chaque individu est dépositaire d'une portion unique de l'histoire familiale. Or, lorsqu’un parent, un grand-parent ou même un frère ou une sœur tombe malade, cette mémoire vivante devient fragile. Très souvent, on réalise trop tard que certaines histoires ne seront plus jamais racontées comme avant. Ces souvenirs sont précieux : ils créent une stabilité identitaire, offrent des repères aux générations futures, et renforcent le sentiment d’appartenance à une lignée.
Préserver l’histoire de sa famille, c’est aussi créer du lien au sein de cette famille. Parler d’événements passés, évoquer des anecdotes ou redécouvrir de vieilles photographies peut faire naître des moments forts, même au milieu de la maladie. Dans de nombreux cas, les souvenirs lointains restent accessibles plus longtemps aux personnes touchées par Alzheimer, offrant ainsi une véritable opportunité de transmission.
Adopter une approche bienveillante pour recueillir les témoignages
Au cœur de cette démarche se trouve une approche humaine et respectueuse du proche malade. Il ne s’agit pas de l’interroger comme dans une interview journalistique, mais de créer un espace sécurisant et doux pour l’échange. Voici quelques principes simples :
- Choisir le bon moment : repérez les instants où la personne semble alerte, davantage disposée à discuter.
- Utiliser des supports visuels : les photos, lettres anciennes, objets du passé peuvent déclencher des souvenirs.
- Formuler des questions ouvertes : préférez "Qu’est-ce que tu ressentais à ce moment-là ?" à "Quelle année c’était ?"
- Ne pas chercher la précision historique : la mémoire reste subjective. Ce qui compte, c’est la trace émotionnelle.
C'est dans cette optique que le livre Raconte-moi ton histoire s’inscrit : un outil pour accompagner ces partages sensibles, grâce à des questions guidées qui n’imposent rien mais ouvrent délicatement des chemins de mémoire.

Choisir le bon support pour collecter les souvenirs
Noter les souvenirs sur des feuilles volantes peut vite conduire à leur perte ou les rendre difficilement exploitables. La démarche prend tout son sens quand elle s’inscrit dans un support pérenne, structuré et agréable à consulter. Carnets, enregistrements audios, vidéos ou encore livres à compléter peuvent tous avoir leur utilité selon la préférence du proche et de la famille.
Par exemple, Raconte-moi ton histoire offre un cadre rassurant : des pages claires, des sections organisées (enfance, adolescence, travail, famille…), et une qualité matérielle qui donne envie de s’y plonger. L’un des moments forts de ce livre repose sur une page spécialement dédiée à l’arbre généalogique, invitant à retracer les liens familiaux parfois oubliés.

Impliquer les générations autour du proche malade
Préserver l'histoire d’un proche malade peut devenir une aventure collective. Les enfants peuvent poser leurs questions naïves ; les petits-enfants peuvent apporter des photos ou enregistrer des messages. Ce lien transgénérationnel redonne vie aux récits, crée des occasions de partage authentiques et contribue à une mémoire familiale vivante.
Il s'agit aussi d'impliquer les aidants, qui peuvent jouer un rôle clé pour encourager le malade à se souvenir par la parole, mais également par la musique, les odeurs, ou les objets de son quotidien d’autrefois.
Quelles conversations privilégier avant que les souvenirs ne disparaissent ?
Certains sujets ont un poids particulier. Selon l’état d’avancement de la maladie, il est utile de privilégier certaines conversations :
- Les premières années de vie : souvent, ces souvenirs restent longtemps vifs.
- Les événements marquants : mariage, naissances, voyages, engagements.
- Les traditions familiales : recettes, chants, coutumes régionales...
Notre article Quelles conversations utiles avoir avant qu’un proche n’oublie ? explore plus en détail cette thématique et peut accompagner cette réflexion.
Créer de nouveaux souvenirs, malgré la maladie
Il est aussi possible de continuer à bâtir des souvenirs, même si la mémoire immédiate faiblit. Faire une promenade ensemble, écouter un vieux disque, feuilleter un album photo – toutes ces activités ont une valeur, même fugace.
Le plus important reste la qualité du moment partagé. Comme nous le montrons dans cet article, les personnes malades ressentent toujours les émotions, même si elles oublient les circonstances.
Un acte de transmission aussi pour soi
Enfin, préserver l’histoire familiale n’est pas qu’un acte altruiste envers les générations futures. C’est aussi une manière de se reconnecter à ses propres racines et de donner du sens à la relation avec le proche malade. Nombre de participants à cette démarche témoignent d’un apaisement, d’un sentiment d’accompagnement et, souvent, redécouvrent leur proche sous un jour nouveau.
Lorsqu’on feuillette un recueil mémoriel comme Raconte-moi ton histoire, rempli par un parent ou un grand-parent malade, c’est un peu d’eux qui continue d’exister dans le silence, la tendresse et les pages tournées. Une mémoire qui subsiste, fidèle et transmissible.
Et pour ceux qui se demandent encore s’il est possible de reconnecter quelqu’un à ses souvenirs anciens malgré la maladie, les pistes existent, les pratiques aussi, et le temps reste un allié tant que les échanges perdurent.