
Pourquoi les souvenirs ont un pouvoir particulier chez les personnes atteintes d’Alzheimer
La maladie d'Alzheimer affecte principalement la mémoire à court terme. Cependant, les souvenirs anciens – ceux de l'enfance, de la jeunesse ou des événements marquants de la vie – peuvent souvent rester intacts plus longtemps. Ainsi, les routines de souvenirs ne sont pas seulement des moyens de connexion émotionnelle : elles deviennent de véritables repères dans un quotidien bouleversé par la perte de mémoire.
Retracer ces souvenirs permet non seulement de stimuler les fonctions cognitives, mais aussi de réactiver l’estime de soi, souvent malmenée chez les personnes atteintes. Les souvenirs sont parmi les dernières sphères d’autonomie qui peuvent être préservées dans la durée, ce qui en fait un levier essentiel de mieux-être.
Instaurer des routines de souvenirs apaisantes dans le quotidien
Les routines offrent un cadre rassurant. Lorsqu’elles sont liées aux souvenirs, elles apportent une stabilité émotionnelle qui peut atténuer l’anxiété et les moments de confusion. Voici quelques types de routines que l’on peut intégrer au rythme de vie d’un proche atteint d’Alzheimer :
- Albums photos commentés : Créez un album chronologique avec des légendes écrites à la main. Prenez le temps chaque jour ou chaque semaine de le feuilleter ensemble en posant des questions simples : « Te souviens-tu de cette maison ? »
- Chansons d’époque : Les morceaux écoutés pendant l’adolescence ou à l’époque des premières amours peuvent déclencher des souvenirs très anciens. Chanter en chœur facilite l’ancrage émotionnel tout en sollicitant la mémoire musicale.
- Objets symboliques : Garder à portée de main des objets chargés d’histoire (montre, bijou, carte postale d’un voyage) peut déclencher sans effort des conversations remplies de sens.
- Moments d’écriture ou de lecture de récits : Lire ensemble un témoignage de vie ou encourager la personne à compléter un journal de souvenirs peut contribuer à maintenir un lien avec ses racines et son histoire personnelle.
Certains outils comme le livre Raconte-moi ton histoire facilitent ces routines. Ce livre à compléter contient des questions guidées qui encouragent la remémoration d’événements marquants de manière douce et valorisante.
Créer une routine hebdomadaire autour de la mémoire
La clé est de rester constant tout en étant attentif à la fatigue ou aux humeurs du jour. Voici un exemple de semaine-type :
- Lundi : Lecture d’un passage autobiographique (ou du livre à compléter) et discussion prolongée
- Mercredi : Écoute d’un disque aimé dans le passé, accompagnée de mouvements simples ou du fredonnement
- Vendredi : Atelier photo ou création d’un arbre généalogique, que l’on peut remplir ensemble au fil des semaines
Rien n’empêche d’adapter ces rituels selon l’évolution de la maladie. L’objectif est moins de raviver la mémoire parfaite que de créer un moment de bien-être et de familiarité.
Quels bienfaits psychologiques pour les malades et leurs proches ?
Mettre l’accent sur les souvenirs redonne un rôle actif au malade. Ces moments agissent comme des fenêtres lumineuses dans une réalité parfois fragmentée. Ils favorisent la réduction des symptômes dépressifs, renforcent les interactions sociales et diminuent les épisodes de confusion, comme le montrent plusieurs études citées par le site de la Alzheimer’s Association.
Pour les aidants, ces routines sont aussi un moyen de redécouvrir le proche au-delà de la maladie. Il est possible de recréer des liens intimes, sans la pression d’un échange logique ou complexe. Des ressources comme notre article Comment dialoguer autour des souvenirs dans les premiers stades d’Alzheimer peuvent également les aiguiller.
Utiliser les témoignages de vie comme repères identitaires
Encourager le malade à raconter son passé, même brièvement, renforce son sentiment d’identité. Par ailleurs, ces récits sont précieux à conserver pour les générations futures. Même lorsque les mots deviennent rares, certaines émotions persistent : une lumière dans le regard, un geste familier, un sourire nostalgique.
Recueillir ces fragments de vie est une démarche profondément humaine. Si cela vous intéresse, vous pouvez lire notre article Comment recueillir le témoignage d’un proche atteint d’Alzheimer avant qu’il ne soit trop tard.

Favoriser l’échange intergénérationnel à travers la mémoire
Les routines de souvenirs sont aussi une formidable opportunité de créer du lien entre les générations. Lorsque les petits-enfants posent des questions à leurs grands-parents, c’est souvent avec une fascination sincère. Cela fortifie des passerelles affectives et donne un sens profond à la transmission familiale.
Pour mieux impliquer les plus jeunes et rendre ces échanges accessibles, vous pouvez consulter notre ressource Comment expliquer la maladie d’Alzheimer aux enfants à travers l’histoire de famille.
Des exemples inspirants de pratiques familières
Voici quelques exemples concrets qui ont permis, dans différentes familles, de renforcer les liens et d’apaiser le quotidien :
- Bernadette, 82 ans, complète quotidiennement une page de son journal-guidé avec l’aide de sa fille. Ce moment partagé est devenu un rendez-vous ritualisé qu’elle attend avec impatience.
- Philippe, 75 ans, écoute chaque dimanche une playlist de ses chansons de jeunesse avec son petit-fils. Ensemble, ils classent les souvenirs suscités dans un cahier illustré.
- Odette, 90 ans, a commencé avec son auxiliaire de vie un collage de photos retraçant son quartier d’enfance. Une façon visuelle et rassurante de reconnecter les souvenirs.
Ces initiatives n’ont rien de miraculeux, mais elles contribuent à améliorer le confort émotionnel des malades et de leur entourage. Pour approfondir ce thème, l’article Quelles questions poser à un proche malade pour ranimer ses souvenirs heureux peut vous inspirer.
Conclusion : des souvenirs au cœur de l’accompagnement
Les routines de souvenirs constituent bien plus qu’une simple activité. Elles sont une façon de combattre la perte d’identité, de renforcer les liens et de rappeler que malgré les trous de mémoire, une vie reste riche de sens. Face à Alzheimer, ce sont justement ces fragments de vie que nous pouvons chérir et préserver.
Dans cette optique, le livre Raconte-moi ton histoire trouve naturellement sa place. En accompagnant une personne dans la narration de son passé, il devient un allié bienveillant à l’intérieur de ces routines douces qui font toute la différence.