À la disparition d’un proche, nous sommes souvent confrontés à un patrimoine très particulier : des centaines, parfois des milliers de fichiers numériques — photos, vidéos, emails, messages vocaux. Ces archives nous mettent face à une double réalité : la place croissante du digital dans nos vies, et la difficulté de transmettre une mémoire au-delà de la mort dans un monde où les supports évoluent sans cesse.

Comment rassembler l’ensemble des données numériques d’un défunt ?
Le premier défi est souvent technique : accéder aux données. Les photos sur son téléphone, les mails stockés dans une boîte Gmail, les vidéos partagées sur un Drive, les messages sauvegardés dans les applications.
Dans certains cas, le défunt a pris soin d’organiser ses affaires numériques en amont — on parle alors de succession numérique. Dans d’autres, c’est un labyrinthe : mots de passe introuvables, comptes verrouillés, formats illisibles. Commencez par dresser une liste des plateformes utilisées (Google, Apple, Facebook, etc.), et contactez leur service client avec les documents nécessaires.
Dans certains pays, les législations permettent à la famille d’accéder aux données d’un défunt sous conditions — en France, c’est la loi Informatique et Libertés qui encadre ce droit post-mortem.
Gérer la charge émotionnelle liée aux souvenirs numériques
Retrouver un film de vacances, un email tendre ou une conversation audio peut provoquer de vives émotions. Cette expérience est à la fois précieuse et douloureuse. Il est essentiel de prendre le temps, d’écouter son rythme et de ne pas chercher à « tout trier » trop vite.
Le fait de revoir des souvenirs numériques demande parfois un accompagnement. Certaines personnes choisissent de le faire en famille, pour partager les émotions, évoquer des anecdotes inconnues, relier les souvenirs. D'autres préfèrent un moment de solitude.
Quoi qu’il en soit, gardez à l’esprit que ces archives numériques ne remplaceront jamais la personne elle-même. Elles constituent des fragments, souvent épars, qui ont surtout du sens replacés dans un récit global.

Comment valoriser ces archives numériques dans la transmission familiale ?
Accumuler 200 Go de photos ou des dizaines d'heures de vidéos ne garantit pas la sauvegarde de la mémoire d’un être cher. Ce qui importe, c’est de contextualiser, d’interpréter, de relier les morceaux.
Une solution est de créer un espace de mémoire structuré : un album numérique légendé, une frise chronologique interactive, un montage audiovisuel avec commentaires vocaux.
Mais pour que ces efforts aient vraiment un sens intergénérationnel, il importe de les inscrire dans une démarche plus large de transmission émotionnelle. C’est ici que des outils comme le livre Raconte-moi ton histoire prennent tout leur sens. Complété par un proche de son vivant, ce livre fait émerger des souvenirs organisés autour de questions guidées. Lorsqu’il est reçu après un décès, il devient un véritable trésor familial, qui donne vie et cohérence à ce que les fichiers numériques ne montrent qu’en partie.
Que dit la loi sur la conservation ou la suppression des données ?
Tous les contenus numériques d’une personne décédée sont considérés comme faisant partie de son patrimoine personnel. Mais les plateformes sur lesquelles ils sont hébergés ne les conservent pas toujours indéfiniment.
Par exemple, Google supprime les comptes inactifs depuis plus de 2 ans. Facebook propose de transformer un compte en « page de commémoration », mais uniquement si une demande est faite. En l’absence d’organisation préalable, les données peuvent donc disparaître rapidement.
C’est pourquoi il est essentiel, aujourd’hui, de réfléchir à sa propre succession numérique. Un geste qui n’a rien de morbide : c’est anticiper pour transmettre dans de bonnes conditions.
Les limites des souvenirs numériques et l'importance des récits
Un problème majeur des traces numériques est leur nature fragmentaire. Une photo, aussi belle soit-elle, ne raconte pas pourquoi ce jour-là était spécial. Un SMS ne dit rien d’une grande décision de vie. Un portrait vidéo reste silencieux sur l’enfance, les peines, les choix fondamentaux.
Les souvenirs numériques sont souvent muets. Ils ont besoin d’explications, de commentaire humain. C’est pourquoi les témoignages oraux, ou mieux encore, les récits écrits sont irremplaçables.
Dans cet esprit, offrir un outil comme Raconte-moi ton histoire à un parent, un grand-parent ou même un ami proche, avant qu’il ne soit trop tard, est une belle manière de recueillir un témoignage complet. Car ce livre n’est pas une simple collection de questions : c’est un support affectif, un cadre pour parler de soi à ceux qu’on aime.
Le compléter en parallèle d’archives numériques permet d'enrichir l’un avec l’autre, de légender les photos, de préciser les souvenirs évoqués dans les vidéos.
Préparer de son vivant l’accès à ses souvenirs numériques
Anticiper n’est pas se résigner, c’est aimer. Il est possible, dès aujourd’hui, de constituer un dossier contenant :
- Les accès aux comptes numériques principaux
- Les indications sur les dossiers à conserver
- Un fichier index (même simple) précisant la nature des contenus
- Un témoignage personnel : lettre, audio, vidéo ou livre complété
Cela évite aux proches de vivre une double peine : le deuil suivi d’une enquête numérique. Et cela permet de transmettre aussi les émotions, pas seulement des fichiers impersonnels.
Quand les souvenirs numériques s’effacent… que reste-t-il ?
De nombreuses personnes découvrent trop tard que les souvenirs numériques sont fragiles : disque dur endommagé, cloud supprimé, formats obsolètes. Face à cela, seul le travail de mémoire intentionnel permet de sauvegarder l’essentiel.
Une biographie rédigée, un journal, un enregistrement, ou tout support permettant de transmettre le vécu dans sa profondeur. Et parfois, cela commence par poser des questions simples : qu’as-tu ressenti à ce moment-là ? Qu’est-ce qui comptait pour toi ? Quel est le souvenir le plus marquant de ton enfance ?
C’est exactement l’objectif de Raconte-moi ton histoire, qui accompagne les familles dans ce processus à la fois intime et essentiel.