Pourquoi mon parent me confond avec quelqu’un d’autre ?

Le livre Raconte-moi ton histoire sur un lit, avec un stylo à côté

Les confusions d'identité : un phénomène fréquent chez les personnes âgées

Lorsque l'un de nos parents commence à nous confondre avec quelqu’un d’autre — un frère, une sœur, un ami d’enfance ou même une personne décédée — cela peut provoquer un mélange de douleur, d’incompréhension et d'inquiétude. Ce phénomène, en apparence banal, peut être le signe de troubles cognitifs plus profonds, ou simplement un effet naturel du vieillissement de la mémoire. Il est donc essentiel de comprendre les mécanismes derrière ces confusions afin de réagir avec bienveillance et de mieux accompagner nos proches concernés.

Pourquoi la mémoire des visages et des liens familiaux décline-t-elle ?

La mémoire humaine fonctionne par associations : visages, noms, expériences vécues, émotions. Avec l’âge, certaines parties du cerveau – comme l’hippocampe et le cortex préfrontal – commencent à s’user, rendant plus difficile la récupération d’une information spécifique, comme le lien familial avec une personne précise. Ainsi, voir son propre fils peut réactiver un souvenir plus ancien : l’image de son propre frère, ou d’un cousin proche dans sa jeunesse.

Dans certains cas, ces confusions peuvent être liées à des pathologies telles que la maladie d’Alzheimer ou d'autres formes de démence sénile. Ces maladies touchent progressivement la mémoire épisodique (celle des souvenirs personnels), rendant les souvenirs anciens plus accessibles que les récents. C’est pourquoi un parent peut confondre son enfant avec une personne qu’il a mieux connue dans le passé.

Les différentes formes de confusion chez les proches âgés

  • Confusion temporelle : le parent pense être dans une époque antérieure de sa vie et s’attend donc à retrouver les personnes de cette époque.
  • Substitution affective : un enfant rappelle, par son attitude ou sa voix, une autre personne aimée, ce qui entraîne une confusion inconsciente.
  • Inversion générationnelle : le parent peut croire que son propre enfant est son frère, ou inversement, car les souvenirs de sa propre jeunesse remontent à la surface.

Comment réagir avec douceur quand un parent ne nous reconnaît plus ?

Ces confusions ne sont pas un rejet de votre personne. Elles sont le reflet d’un mécanisme défaillant dans une mémoire surchargée ou fragilisée. Dans ces moments-là :

  • Ne pas corriger brutalement : contredire peut aggraver leur désarroi.
  • Rentrer dans leur univers mental, poser des questions, s’intéresser à la personne avec qui ils vous confondent.
  • Utiliser des photos ou objets contextuels pour raviver des souvenirs partagés.

Le site Comment aider un proche à se rappeler de son passé malgré la maladie d’Alzheimer offre plusieurs conseils pratiques utiles dans ces situations sensibles.

Favoriser la réminiscence : un levier précieux

Encourager un proche à raconter ses souvenirs est non seulement thérapeutique, mais aussi une manière de reconstruire des liens et de ralentir le processus de déclin cognitif. Plus la personne accède régulièrement à ses souvenirs, plus elle maintient son identité cohérente dans le temps.

Des outils spécifiques existent pour cela. Par exemple, le livre “Raconte-moi ton histoire” propose des questions guidées qui accompagnent les personnes âgées dans la reconstruction de leur parcours de vie. Cette démarche peut raviver des souvenirs dormants, renforcer le sentiment de filiation et offrir aux descendants une trace précieuse et authentique.

Le livre Raconte-moi ton histoire ouvert à la page d’un arbre généalogique

Le lien entre perte de mémoire et souvenirs familiaux

Une étude publiée par l'Inserm en 2022 confirme que les souvenirs les plus anciens, notamment ceux de l'enfance et de la vie de famille, sont souvent mieux conservés malgré la progression de la démence. Cela explique pourquoi votre mère vous appelle parfois par le prénom de son frère ou pense que vous êtes l’enfant que vous étiez il y a quarante ans. La perception du temps devient floue, l'identité des individus se superpose dans leur esprit.

C’est dans ce contexte que l’envie de préserver les souvenirs des personnes âgées atteintes d’Alzheimer prend tout son sens : la transmission d’histoires personnelles devient essentielle, à la fois pour celui qui se raconte que pour celui qui écoute.

Petit à petit, reconstruire la mémoire partagée

Vous pouvez amorcer des conversations autour de photos de famille, remonter l’arbre généalogique à travers les souvenirs et les relations. Cela permet non seulement de conforter l’identité de votre parent, mais aussi de créer un espace émotionnel rassurant.

Des outils comme “Raconte-moi ton histoire” peuvent servir de support à ces échanges. Beaucoup de familles utilisent ce recueil dans ces instants intimes, soit à voix haute, soit en écrivant ensemble. Il offre plus qu’un simple recueil de réponses : une vraie passerelle entre les générations.

Quand consulter un spécialiste ?

Si ces confusions deviennent fréquentes, incohérentes ou s’accompagnent d’autres troubles (désorientation, comportements inhabituels, difficulté à reconnaître l’environnement), il est nécessaire de consulter. Un gériatre ou un neurologue pourra établir un diagnostic et proposer une prise en charge. Cet article sur les stades de la maladie d’Alzheimer peut vous aider à mieux situer votre parent dans ce parcours complexe et souvent silencieux.

Redonner un sens à la transmission, même quand les mots manquent

Si vos parents commencent à vous confondre avec d’autres, c’est peut-être aussi le signe qu’il est temps de documenter ce qu’ils ont vécu. Non seulement pour préserver leur mémoire, mais aussi la vôtre. Recueillir leurs souvenirs, entendre les anecdotes familiales, transmettre cette histoire incarnée est un geste précieux.

De nombreux jeunes adultes se tournent aujourd’hui vers des formes modernes de mémoire intergénérationnelle. Plusieurs utilisent par exemple le livre “Raconte-moi ton histoire”, aussi bien comme journal de souvenirs que comme acte symbolique d’héritage affectif. Offert lors d’un anniversaire, à Noël ou juste “parce que c’est le bon moment”, il devient un prétexte pour se rapprocher.

Conclusion : une confusion pleine de sens

Être confondu avec quelqu’un d’autre, ce n’est pas perdre sa place dans le cœur de ses parents. C’est parfois l’expression d’un cerveau fatigué qui tente de reconstituer une histoire. C’est aussi une invitation à renouer un dialogue profond que la routine ou les années ont mis à distance. Parler des souvenirs, s’asseoir, écouter, écrire à deux : de petits gestes qui peuvent tout changer.

Pour creuser ce sujet, découvrez aussi notre article sur les souvenirs qui disparaissent en premier avec Alzheimer. Vous y verrez combien le passé peut encore nous réunir, même quand le présent vacille.